Témoignage : La vie à Aubréville, du 29 octobre au 3 décembre 1914
La vie à Aubréville
du 29 octobre au 3 décembre 1914
Jeudi 29 octobre : A mon arrivée, une batterie française, installée derrière ma maison, tirait sur Vauquois.
Vendredi 30 octobre : Les Allemands ont envoyé 3 obus sur le village sans dégâts. Un obus est tombé dans les décombres d’une maison incendiée.
Samedi 31 octobre : Nos troupes bombardent toujours vers Vauquois, Boureuilles et Montfaucon. A 11 heures, 6 obus sur le village dont un derrière la maison de Monsieur Langlois, face à la gare ; un arbre coupé, plusieurs autres hachés, les carreaux cassés, le mur troué ainsi que chez Madame Claude, la maison voisine. Un obus dans le jardin du chef de gare, juste en face de la gare ; les carreaux de la gare cassés, 15 fils du télégraphe coupés par les éclats ; un obus à l’angle d’une fenêtre de la maison de Monsieur Granjean ; le mur percé, fenêtres et persiennes brisées et l’intérieur de la chambre hachée. J’ai vu arriver cet obus. Les 3 autres obus sur la côte près de l’église.
Dimanche 1er novembre : Forte canonnade sur le front. A 11h30, 8 obus sur le pays dont un a fait de graves dégâts sur la maison de Monsieur Chapat, un autre a tué 4 soldats qui étaient sous un abri derrière la maison de Monsieur Hénin ; un des tués n’avait plus de tête ; un obus est tombé sur les maisons incendiées, un près de la barrière côté du moulin, 3 derrière la maison de Madame Bochot et le 8ème est tomé dans la rue de la Gare à l’angle de la maison de Monsieur Précheur, aubergiste, a tué 7 soldats et blessé 8, a tué 3 chevaux dont un avait plus de 25 blessures et le haut du coprs coupé. Un soldat était trépané, un avait les deux jambes coupées, un avait été blessé à l’épaule dans le bureau du percepteur situé à 35 mètres de l’explosion.
Lundi 2 novembre : Toujours le canon. Les Boches bombardent Neuvilly et on entend siffler les obus. Pas d’obus sur Aubréville ce jour.
Mardi 3 novembre : Forte canonnade toute la journée. A 11 heures, 10 obus sur Aubréville ; un soldat a été blessé et un civil Monsieur Gaucher. Pas de dégâts.
Mercredi 4 au Mercredi 11 : Tous les jours le canon sur le front. Vendredi 6, mitrailleuses et canons avec violence la nuit. Un aéro boche a survolé le village et a été canonné sans résultat.
Jeudi 12 novembre : 51 gros obus sur la voie du chemin de fer entre Aubréville et Courcelles ; 3 rails ont été cassés, tous les carreaux de la maison du passage à niveau cassés, un soldat tué et 10 blessés.
Vendredi 13 au Jeudi 19 inclus : Canonnade sans interruption sur le front.
Vendredi 20 novembre : 6 obus sur le village dont 2 à droite de la ligne. Un sur le pont de la rivière dans le milieu du village côté de la maison de Monsieur Cocu Henri et qui a tué 4 soldats et blessé 3.
Du 21 au 24 : Toujours la canonnade sur Vauquois, Boureuilles et Montfaucon.
Mercredi 25 novembre : 2 obus à gauche de la gare. Canonnade sur le front.
Vendredi 27 novembre : 5 obus dont 2 à gauche de la gare et 3 près de l’église.
Samedi 28 novembre : 2 obus près l’église et forte canonnade.
Dimanche 29, Lundi 30 et Mardi 1er décembre : Canonnade, mitrailleuses et fusils.
Mercredi 2 décembre : 3 obus sur la côte près de l’église.
Jeudi 3 décembre : 21 obus sur Aubréville de 10h matin à 13h30. Un obus a tué le caporal Boulay qui venait de me quitter étant venu me demander des nouvelles de sa famille chez laquelle j’étais à Paris le 30 novembre. Il venait de rentrer dans la grange où il était au repos, lorsque l’obus tombant sur le toit de la maison voisine, traversé le mur de séparation et vint éclater sur une poutre du grenier à foin entre les jambes de Boulay ; une jambe était disparue et l’autre déchiquetée ; on retrouva le pied gauche le lendemain ; un autre obus tomba sur le fumier en face de Monsieur Vitry et les autres près de l’église.
Source : AD Meuse – Le Bulletin Meusien du 21 janvier 1915