Cheppy sous le feu allemand (septembre 1914)
Cheppy en septembre 1914
Les premières rencontres des Allemands avec notre vaillante armée sur notre territoire, se prononcèrent le 3 septembre, à la suite du passage de la Meuse à Dun, Brieulles et Consenvoye.
Tous les chemins, semblables à des fleuves humains, étaient couverts d’infanterie, de cavalerie, de caissons, de canons. Les hauteurs des pays voisins , Epinonville, Vauquois, Baulny, hérissées de canons qui crachaient la mitraille, les éclats d’obus arrosaient les maisons de Cheppy et de Véry.
L’artillerie française répondait des crêtes de Varennes.
Après plusieurs heures de lutte, notre armée se replia sur l’Argonne. Les Boches se dirigèrent sur Sainte-Ménéhould, Revigny, Trois-Fontaines, pillant et terrorisant sur leur passage.
Les habitant s’étaient enfuis à l’aspect des hordes barbares, laissant à l’abandon leurs maisons, leurs meubles, leur bétail, leurs provisions, leurs récoltes. Une centaine d’entre eux, croyant trouver la sécurité dans les forêts de la Placardelle, de la Harazée, et de Vienne-le-Château, campaient sous bois aux environs du ruisseau de la Cheppe.
Mais les Allemands continuant, comme une vague humaine, à déferler sur la région argonnaise, ne laissèrent à Cheppy qu’une faible garnison qui ne s’opposa pas au retour des fuyards de la commune.
C’était de la part de ces derniers une fausse manœuvre, car les Allemands leur firent souffrir des traitements intolérables, les enfermant chaque nuit dans l’église pendant qu’ils se livraient au pillage, les gardant le jour en les empêchant de sortir du village pendant que les soldats fortifiaient les points culminants, s’emparant des anciennes carrières de phosphates où ils plaçaient leurs batteries, garnissant les pentes de fascines et d’éboulis d’arbres protégés par des fils de fer barbelés, disposant des refuges sur les pentes du Vieux Moulin et du Ratentout pour protéger la vallée de la Buhante (affluent de l’Aire) et ménageant le chemin de la retraite à leurs cohortes obligées de rebrousser chemin à la suite de leur défaite de la Marne.
C’est ici que se place la destruction du village à la suite de plusieurs combats sanglants, qui eurent lieu entre le 10 et le 25 septembre.
Ceux du 22 et du 24 en particulier eurent pour théâtre la rue principale, dont toutes les maisons furent prises d’assaut. La place du Château et le ravin de Royen virent des rencontres cruelles à la baïonnette soutenue par le canon et les mitrailleuses.
Des centaines de cadavres d’hommes et de chevaux jonchent encore tous les chemins du village devenu inhabitable par suite de l’infection qui en résulte.
C’est dans cette période que plusieurs cultivateurs réfugiés dans leurs caves au moment du bombardement furent tués par des obus.
On cite comme morts : les époux Gilbin-Jourdain, Victor Fétus et vieux paralytique.
Les maisons Clause, Lambert, Gauny, Pérotin, Habrant, et la mairie durent réduites en cendres. La rangée des habitations d’en face presque détruite ; on cite comme très endommagées les maisons Legendre, Lambert-Larue, Thirion Henry, Liénard-Mazet.
Quant à la partie haute du village où se trouve l’église, elle fut surtout le point de mire des obus de Montfaucon qui abattirent le clocher et incendièrent les immeubles Barthélémy, Gersant-Lecourtier, Raulin, Parise.
Le maire fut continuellement sous la crainte des Boches qui le menaçaient de le fusiller si un seul coup de feu était tiré dans la commune pendant la nuit. Dans son hégire du dernier jour, il faut atteint d’un éclat d’obus qui lui occasionna une blessure légère au côté.
Quant au maire de Vauquois, il fut fusillé par nos ennemis, qui ont transformé la butte en une gigantesque taupinière dominant le chemin du Four-de-Paris, et où ils ont construit des chemins couverts en ciment armé, protégés contre la pluie par toues les volets, meubles, portes, démolitions et agrémentés d’embrasures pour leurs canons toujours prêts à vomir leurs marmites sur les assaillants.
Entre Cheppy et Montfaucon, la ferme de Neuve-Grange, située sous bois, sert de magasin de provisions aux Allemands qui l’ont reliée par un chemin de fer Decauville avec la route de Dun.
On ajoute qu’ils exploitent les plus beaux arbres des forêts de Cheppy et d’Argonne pour les envoyer en Allemagne rejoindre nos pendules, nos meubles et notre linge. (de la Croix Meusienne)
Source : AD Meuse – Le Bulletin Meusien du 14 janvier 1915