22 mars 1915 : Rapport de Tournée dans la IIIème Armée

Rapport de Tournée dans la IIIème Armée

 

 

G.Q.G. le 22 mars 1915

TOURNEE DANS LA IIIème ARMEE

(20 et 21 mars 1915)

Dans toute la partie humide du massif de l’Argonne les tranchées sont peu enterrées et comportent en général un parapet rapporté sur le sol naturel et maintenu par des clayonnages.

Dans ce massif en terre sont noyés des créneaux, sortes de caisses en bois ayant la forme d’un tronc de pyramide disposées la pointe du côté de l’ennemi. L’emploi de ce genre de travaux n’est pas d’ailleurs particulier à la IIIème Armée ; il se retrouve mais moins généralisé dans plusieurs autres – mais suivant les armées, les créneaux sont évasés vers l’ennemi ou au contraire évasés vers l’intérieur de la tranchée. Cette dernière disposition a l’avantage de diminuer la visibilité du créneau et de la rendre plus difficile à repérer, par contre elle est beaucoup moins satisfaisante au point de vue de la visibilité de l’objectif. D’une manière générale, il convient de signaler combien ce genre de créneau diminue le champ de tir en même temps qu’il gène le tireur. Quelques officiers d’infanterie consultés spécialement sur ce point vont même jusqu’à admettre que sur les points de la première ligne où on est à très faible distance (30 à 40 mètres) il faut supprimer les créneaux et n’avoir qu’un simple parapet par-dessus lequel le défenseur peut facilement voir et rapidement tirer. Sans aller jusque là, il parait convenable de s’en tenir dans ce cas à des boucliers métalliques ou mixtes de peu d’épaisseur qui tout en protégeant le tireur ne diminue pas sensiblement son champ de tir.

En avant de ces tranchées de première ligne les défenses accessoires constituées en grande partie par des réseaux de fil de fer sont d’importance très variable. En certains points où on a été conduit à abandonner les éléments avancés de la première ligne pour tenir avec plus d’efficacité une position organisée en arrière sous la protection de ces éléments, on a pu profiter des défenses accessoires solides établies antérieurement en arrière, alors on se trouve protégé souvent par deux bandes d’une dizaine de mètres de profondeur séparées par un intervalle d’au moins dix mètres.

Le tracé de la ligne a été déterminé de façon à avoir des organes de flanquement (généralement des mitrailleuses) placés de façon à tirer normalement dans l’ensemble qui sépare  ces deux bandes de réseaux. On a ainsi un front qu’on peut considérer comme très fort et inviolable, alors qu’en face l’ennemi qui est venu s’établir dans les éléments avancés abandonnés n’a pas pu construire de réseau pour se protéger. Quelques fois aussi ces éléments avancés n’ont pas été complètement évacués, mais ils sont alors tenus facilement par de simples postes d’observation.

En certains points, en particulier du côté de Malancourt on fait usage de réseaux BRUN qui se sont très bien maintenus et qui on l’avantage de rester presque invisibles, même pour celui qui les aborde.

Les boyaux de communication n’ont pas toujours une profondeur suffisante et sont peu nombreux ; toutefois en raison de la nature boisée du terrain sur la plus grande partie du front, des dispositions n’ont pas en réalité de grands inconvénients.

  

Destruction des réseaux de fil de fer :

Les réseaux de fil de fer tant français qu’allemands sont en général établis au milieu des bois utilisant comme piquets des arbres et baliveaux coupés à 1 mètre au dessus du sol. On obtient ainsi un réseau solidement ancré dans le sol et pour la destruction duquel les canons porte amarres sont insuffisants. Il faut avoir recours aux explosifs et le procédé qui semble le plus en faveur est l’emploi des pétards de 5kg lancés avec le mortier de 15

En dehors de ce cas, l’emploi du canon porte amarre à plusieurs fois donné de bons résultats à la IIIème Armée.

 

Engin de protection :

On considère comme absolument indispensable de disposer dans les tranchées de première ligne d’un nombre assez grand de guérites observatoires pour la surveillance du terrain en avant. Ces guérites observatoires deviendront encore plus nécessaires si, comme il est dit plus haut, on arrive à abandonner le créneau sur les tranchées de 1ère ligne très voisines de l’ennemi.

 

Artillerie de tranchée :

Les petits mortiers (genre Cellerier) sont très en faveur à la IIIème Armée. Des ateliers très bien montés à Sainte-Ménéhould et à Longeville (près la D.E.S. de Bar-le-Duc) alimentent puissamment cette artillerie en fournissant 300 ou 400 projectiles (0,5 – 2,5 ou 5kg de cheddite par jour)

Tant en regrettant les inconvénients de la poudre noire, les deux Corps d’Armée (5ème et 15ème Corps) que j’ai vus en admettent l’usage.

On réclame un approvisionnement suffisant de projectiles pour le canon Dumezil.

 

Matériel divers :

On a signalé l’insuffisance des téléphones. Les communications sont difficiles dans l’Argonne et l’usage du téléphone y est partout nécessaire. Le 15ème Corps à lui seul demande une cotation supplémentaire de 30 appareils.

Insuffisance de fusées éclairantes de pistolets signaleurs

On demande des périscopes horizontaux s’adaptant au fusil.

Il a été rappelé aux État-major qui ont exprimé ces desiderata qu’il leur appartenait de réclamer ces objets par leur D.E.S.

 

Travaux de mine :

D’après les renseignements donnés par le Général Commandant le Génie on a fait jusqu’ici dans le 32ème Corps pour arrêter les têtes de sape et détruire les réseaux près de 1400 mètres de travaux souterrains (sapes couvertes en rameaux).

Dans le 5ème Corps on a fait dans les mêmes conditions 3000 mètres.

Pour toutes ces attaques, le travail par les procédés normaux a suffi. Vu leur faible longueur, on n’eut pas gagné de temps à installer des appareils mécaniques.

Au saillant du bois de Malancourt, on avait placé un appareil Morane qui a eu un bon rendement tant qu’on est resté dans le terrain favorable, mais qu’il a fallu replier dès qu’on a rencontré le roc dur.

D’une manière générale les appareils mécaniques ne peuvent être réellement utiles que dans une opération se rapprochant de la guerre de mines.

 

Main d’œuvre :

Une lacune se présente à la traversée de la forêt de Hesse dans l’organisation de la 2ème ligne en une de ses parties où d’un côté elle est précisément le plus approchée de la 1ère ligne (Pont des 4 enfants à la point du bois de Cheppy) et où de l’autre côté ; elle se soude au barrage de Neuvilly.

Pour combler cette lacune, il conviendrait d’attribuer au 5ème Corps un millier de travailleurs pendant 3 semaines. Ce complément temporaire de travailleurs est vivement demandé par l’Etat-major de la 3ème Armée, par le Général Commandant le Génie. On croit devoir rappeler que au dehors de leurs effectifs, le 22ème Corps dispose de 2 bataillons territoriaux passés par le 2ème Corps , le 15ème Corps de 1000 travailleurs mis temporairement à sa disposition par la place de Verdun.

Seul le 5ème Corps n’a pas de travailleurs supplémentaires.

 

 

Le Général

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